Le milliardaire franco-israélien, Beny Steinmetz, accusé de corruption dans le dossier de Benny Steinmetz Group Resources (BSGR), a été récemment condamné à cinq ans de prison à l’issue de son procès, tenu à Genève (Suisse), et au paiement d’environ 56,5 millions de dollars USD d’amende.
Deux de ses proches, Frédéric Cilins et Sandra Merloni-Horemans, ont également été condamnés à des peines de prison comprises entre 2 et 3 ans, dont une période de sursis. Les accusés ont décidé d’interjeter appel.
En attendant, l’ancien vice-président de la BSGR en Guinée, Ibrahima Sory Touré, frère de Mme Mamadie Touré, présentée comme la quatrième épouse du défunt président, le général Lansana Conté, s’est exprimé dans cette interview accordée à WESTAF MINING. Exclusif.
WESTAF MINING : Comment appréciez-vous la condamnation, par le tribunal de Genève, pour des faits de « corruption d’agents publics étrangers », de l’homme d’affaires israélien, Beny Steinmetz ?
Ibrahima Sory Touré : La base même de la condamnation de M. Steinmetz est inique. Le fondement du jugement est faux parce que Mamadie n’est pas l’épouse de Conté et cela est très facile à prouver. Les juges recherchaient la corruption d’agents publics étrangers et c’est Mamadie qu’on présente comme cet « agent public ».
C’est totalement aberrant, car n’étant ni fonctionnaire ni, comme on veut la présenter, une épouse du défunt président Lansana Conté. Elle ne saurait être garante d’aucun acte administratif ou juridique en Guinée. Le comble, c’est qu’elle n’est même pas venue au procès. Un appel annulera ce jugement qui ne nous a même pas respectés.
WESTAF MINING : Pourquoi en êtes-vous si sûrs ?
Ibrahima Sory Touré : Pour moi, le procureur de Genève a commis une faute grave dans le déroulement de ce procès. On parle ici d’un tribunal correctionnel, c’est-à dire un tribunal qui est censé convoquer toutes les parties. J’ai été personnellement surpris de voir que c’est seulement M. Steinmetz et M. Cilins Frédéric (et aussi Sandra Merloni-Horemans) qui ont été convoqués.
Beny Steinmetz ne dirige même pas BSGR, ne signe aucun document de la Société et donc, il n’est en rien lié à tout ce qu’on chante dans ce complot fomenté par Georges Soros (ndlr : milliardaire américano-hongrois, gourou de la finance).
Quant à Frédéric Cilins, il n’est pas un employé de BSGR, mais un simple agent privé qui ne travaille que pour son propre compte. M. Cilins n’a de comptes à rendre qu’à lui-même. Dès lors, comment peut-on convoquer des personnes qui ne sont pas liées directement à BSGR pour leur faire un procès de présumé corruption d’agents publics étrangers ?
WESTAF MINING : Pourquoi selon vous la justice parle de corruption alors ?
Ibrahima Sory Touré : Mais aucun fonctionnaire guinéen ne reconnaît avoir été corrompu. D’ailleurs, si c’était le cas, pensez-vous qu’il y aurait un tel chantage ? Aucun des ministres qui ont eu à signer les arrêtés des permis miniers de BSGR ne reconnaît avoir été corrompu. Moi-même, je ne comprends pas cet acharnement, aucun agent public guinéen, président, ministre ou autres, ne reconnaît cette accusation.
WESTAF MINING : En faisant le parallèle avec les accusations lancées contre Steinmetz, Cilins et Merloni-Horlemans, aujourd’hui condamnés à Genève, n’êtes-vous pas choqué par les messages électroniques (emails) qui ont circulé entre des hauts dirigeants de la compagnie Rio Tinto qui était installée sur les blocs disputés, indiquant qu’un montant de 10,5 millions de dollars USD a été versé au français François Polge de Combret, sans aucune poursuite contre cette compagnie ?
Ibrahima Sory Touré : C’est encore plus que étonnant de voir que, dans un tribunal correctionnel, des personnes qui se sont déclarées coupables des faits de corruption, comme Mamadie Touré ne soient pas entendues.
Pourquoi n’a-t-elle pas été convoquée ? Ne serait-ce que pour expliquer son statut, ses liens et défendre des contradictions dans ce dossier, car pour moi, c’est une dame très dangereuse.
Mamadie est un témoin protégé aux États-Unis, mais pas en Suisse. Si le procureur de Genève ne pouvait pas la convoquer et la faire venir au tribunal, eh bien, il ne fallait même pas organiser ce procès. On ne doit pas protéger une personne qui ment sur son statut.
WESTAF MINING : Que voulez-vous dire ?
Ibrahima Sory Touré : Mamadie est ma propre soeur, je la connais et je sais qu’elle est capable de tout, Elle a menti au consulat américain en complicité avec certaines personnalités guinéennes afin qu’elle et son clan qui continue de la soutenir dans ce mensonge, puissent bénéficier de facilités de visas d’entrée aux Etats-Unis.
C’est même honteux de proférer ce genre de mensonge ! Elle s’est proclamée épouse du feu Général Lansana Conté après la mort de celui-ci. Je me rappelle bien, jusqu’en 2009, donc après le décès de l’ancien président, ses propres documents d’identité la décrivaient comme une simple femme d’affaires.
WESTAF MINING : Soyez plus explicite M. Touré…
Ibrahima Sory Touré : Ces papiers ne faisaient aucune mention d’un quelconque lien de mariage avec le général Conté ! Nous avons nos propres usages et coutumes en tant qu’africains. Il est donc très facile de démonter et de démasquer le mensonge de cette femme.
Elle sait qu’elle n’a aucun lien de mariage avec le général Lansana Conté. Ni coutumier, ni religieux. Celui qui ne veut pas démasquer ce mensonge-là ne veut rien savoir sur la vérité et sur l’état d’esprit de cette femme qui a menti au monde entier, y compris au FBI.
Si maintenant on continue à la protéger, sans la confronter à la réalité des faits, de qui se moque-t-on ? Je suis convaincu que les soutiens de Mamadie réfutent toute idée de la voir comparaître devant les juridictions, de peur que leur plan ne tombe à l’eau. Les experts de Soros font tout pour ça. Mais l’appel étant interjeté, Mamadie sera obligée de comparaître, sinon le dossier sera classé sans suite.
WESTAF MINING : Mais on reproche à la BSGR d’avoir donné des pots de vin lors de l’attribution des titres miniers en 2006 et en 2008. C’est une accusation sérieuse et aujourd’hui vos détracteurs peuvent souligner le fait que Steinmetz, Cilins et Merloni-Horemans ont été condamnés.
Ibrahima Sory Touré : Je ne vois pas un homme qui va me convaincre que BSGR a payé des pots-de-vin. À quel fonctionnaire? Puisque j’étais là depuis le début, je me sens fier de mon travail honnête. Et puis, les titres dont vous parlez, obtenus en 2006, étaient les extrémités Nord et Sud de Simandou. Des zones qui n’étaient pas explorées et dont personne ne voulait. Aucun guinéen n’avait connaissance de l’existence de cette mine de fer (ndlr : Zogota) dans ces zones-là. C’est même absurde de croire à des histoires de pots- de-vin dans quelque chose que personne ne connaissait.
Comment peut-on payer pour quelque chose qui n’existait pas ? Cette mine de Zogota n’était pas répertoriée dans le cadastre minier guinéen. Il a fallu les investissements de près de 200 millions de dollars USD de BSGR pour la sortir de l’ornière.
WESTAF MINING : On reproche aussi à Steinmetz d’avoir fait une énorme plus-value lors de sa joint-venture avec le géant minier brésilien Vale. Qu’en dites-vous ?
Ibrahima Sory Touré : Quand j’entends les médias aux ordres de Soros dire que Beny a acheté les blocs à 170 millions de dollars USD avant de les revendre à 2,5 milliards de dollars USD, je suis abasourdi. On confond visiblement un achat à un investissement fait dans le cadre de l’exploration et cela est malhonnête.
Mais je comprends que ce sont des intox qui montrent que certains journalistes ont choisi leur camp. C’est absolument faux. Il s’agit d’une joint-venture régulière pour exploiter une réserve de fer que notre concurrent (ndlr : Rio Tinto) avait gelé depuis 1997. Jusqu’à ce jour, c’est le cas.
Pas un gramme de fer n’a été exporté par cette compagnie. Il y a une énorme injustice dans cette histoire transformée en opération de communication en faveur de nos adversaires, alors que BSGR n’a commis aucun délit. Nous sommes de très bonne foi et nous n’avons absolument rien à nous reprocher.
WESTAF MINING : Pourquoi les blocs 1 et 2 de Simandou ont été cédés à votre groupe en 2008 ?
Ibrahima Sory Touré : Les gens font du bruit pour rien. Les blocs 1 et 2 ont été obtenus sur la base d’une rétrocession légale. La loi guinéenne oblige les compagnies à rétrocéder la moitié de leur territoire initial après l’exploration et c’est ce qui a été appliqué, surtout après notre succès dans la découverte de la mine de Zogota. Si cette rétrocession n’était pas légale, le gouvernement actuel allait retourner les blocs 1 et 2 à Rio Tinto ! Vous devez comprendre qu’on est en train de discuter de l’intérêt des guinéens qui réside dans l’exploitation de nos mines au profit de millions de personnes, pour leur permettre de s’épanouir et d’améliorer leurs conditions de vie, et celle d’une compagnie minière multinationale, tenue par quelques actionnaires déjà riches, qui avait délibérément choisi de geler une ressource dont la Guinée avait grandement besoin. Un pays pauvre doit exploiter ses ressources pour améliorer sa situation. Il ne faut pas se tromper de combat.
WESTAF MINING : Un dernier mot ?
Ibrahima Sory Touré : Je vais terminer par vous dire que seul Dieu est justice. Je vous remercie
Propos recueillis par Westaf Mining
Sources Westaf Mining
Proposé par Abdoulaye NDiaye
